mercredi 19 septembre 2007

070919 FRANCE CULTURE

France Culture DU GRAIN A MOUDRE
par Brice Couturier et Tara Schlegel

émission du mercredi 29 août 2007 : écouter l'émission >>>
(lien "rue des instits")

Veut-on encore faire réussir tous les élèves?

Le constat paraît terrible. 40% des élèves sortent du CM2 avec de graves lacunes en français et en mathématiques. 4 élèves sur 10 c'est un pourcentage un peu abstrait (comme ça), derrière lequel se cachent 300 000 enfants chaque année.
Plus grave encore ces élèves n'ont pratiquement aucune chance de quitter le système scolaire, en maîtrisant vraiment les savoirs fondamentaux. Car ceux qui échouent dès le primaire, n'arrivent pas à rattraper leur retard.

Telle est la conclusion alarmante du Haut Conseil à l'Education. Qui a rendu son rapport avant-hier. Les 9 sages se sont penchés sur le primaire et la maternelle, essentiellement grâce à des études déjà connues – et tirent la sonnette d'alarme.

Face à ces Cassandres, que peut-on faire ?
Faut-il – comme en manqueront pas de le marteler … ceux qu'on qualifie de conservateurs – faut-il … réhabiliter le « par cœur » à l'école ?
Imposer – comme l'a fait le Ministre Gilles de Robien (janv 2006)– la méthode syllabique, autrement dit un retour au « b.a.-ba » … pour garantir aux enfants du CP qu'ils sauront lire dès Noël.

Doit-on obliger les enfants à se lever quand l'enseignant entre dans sa classe ? C'était proposition du candidat Sarkozy soucieux de rétablir l'autorité des maîtres, baffouée par l'idéologie de mai 68.
Faut-il … systématiquement … faire … des dictées de mots, tous les jours ?

A l'heure où plus de 12 millions d'élèves prennent le chemin des préaux, toutes ces questions sont loin d'être tranchées.


Elles donnent même lieu à d'âpres débats, portés depuis quelques années par ceux qu'on a nommés les «républicains», «les hussards noirs» bref, les «champions de l'anti-pédagogisme». Ceux qui s'élèvent contre une école, acceuillant toujours plus d'élèves, mais tout juste capable – pour reprendre le mot de Jean-Paul Brighelli (l'un de leurs chefs de file) de « fabriquer des crétins ».
Cette institution aurait abandonné toute ambition d'instruire ses élèves, elle ne serait plus qu'une machine a reproduire des inégalités sociales.

La faute à qui ? accusent ceux qui se voient comme des résistants.
La faute aux « pédagogistes » justement : A ces experts, comme Philippe Meirieu (par exemple) … qui est l'un de nos invités aujourd'hui - à ces penseurs de la transmission des savoirs, qui auraient oublié à quel point le contenu des enseignements est aussi essentiel.
A force de faire confiance aux élèves – capables (pensent les pédagogistes) deconstruire eux-même leurs savoirs – à force de miser sur un enseignement ludique, et sans contraintes … on aurait oublié d'enseigner aux enfants le goût de l'effort, de l'inutile et des belles lettres.

Voilà posé en quelques phrases le décor d'une vraie polémique :

Quand 150 000 élèves quittent aujourd'hui l'école sans diplôme, quand 10% seulement des fils d'ouvriers se retrouvent à l'université … il y a urgence à se demander : comment faire réussir tous les élèves ?


c Philippe Meirieu . Ancien directeur de l'Institut National de Recherche Pédagogique, il enseigne les sciences de l'éducation à l'Université de Lyon

c Michel Delord . Professeur certifié de Mathématiques, Membre du conseil d'administration de la SMF

c Natacha Polony . Journaliste à Marianne


LIVRE
Natacha Polony
"M(me) le Président, si vous osiez...."
Mille et une nuits - Collection : Essai - 2007

«Toutes les familles partagent une vive inquiétude pour l'avenir de leurs enfants : l'école ne remplit plus sa mission d'enseignement, elle produit même une forme d'ignorance. Les parents ne sont pas dupes. Désormais, leur confiance en l'"organe de la République" est entamée. Depuis plus d'une dizaine d'années, le diagnostic des graves échecs de l'école a été posé, notamment par des enseignants dissidents de l'Éducation nationale. Depuis trop longtemps, rien n'a été entrepris qui soit venu freiner la dégradation.

M(me) le Président, vous qui arrivez à l'Élysée dans l'euphorie d'une nouvelle mandature, ne gâchez pas la chance qui nous est offerte à tous. Parez au plus pressé, remédiez à la situation qui affecte et préoccupe l'ensemble des Français, osez prendre une série de mesures pour l'école. Il est temps, non pas de concocter un énième programme, mais de définir le sens de la remise en marche de l'institution scolaire. Vous savez bien que vous ne pouvez, comme vos prédécesseurs, laisser passer cet "état de grâce" qui vous donne la légitimité d'agir. Vous ne pouvez trahir les aspirations des Français. La France, son peuple, l'Histoire ne vous le pardonneraient pas.»